MECANISMES DE DEFENSE
Pour faire face aux agressions qu’elles subissent, les victimes de violences sexuelles mettent en place des mécanismes de défense. Ceux-ci peuvent entrainer paralysie, sentiment de déconnexion voire oubli total des évènements. Ces réactions ne sont pas propres aux victimes d’agressions sexuelles : elles peuvent concerner toute personne ayant subi un traumatisme.
LA SIDERATION PSYCHIQUE
« Je me suis figée, je n’ai pas pu bouger, je n’ai pas pu dire quoique ce soit, je n’avais plus accès au mot ‘non’ »
Face à leur agresseur, de nombreuses victimes sont dans l’incapacité de penser, de crier et de se défendre. Selon une étude de l’Institut suédois Karolinska publiée en 2017, 69,8 % des victimes de viol déclarent avoir été totalement paralysées face à leur agresseur. Cette forme de paralysie est appelée « la sidération psychique ».
LA DISSOCIATION
« Je suis plus haut de mon corps, je ne suis pas le pilote de mon corps, je me voyais subir ».La sidération peut s’accompagner d’un autre mécanisme : « la dissociation » ; un autre mécanisme de défense. Ce mécanisme de défense se concrétise par un sentiment de déconnection avec la douleur, les sensations et les émotions. Elle peut durer plusieurs minutes, heures voire s’installer dans la durée, après même la fin de l’évènement traumatique.
Cela s’explique aussi scientifiquement :
Comme nous l’avons vu ci-dessus, dans les situations les plus dangereuses, le cortex ne permet plus de réguler l’amygdale cérébrale qui va donc secréter des doses de plus en plus élevées des hormones du stress. Or, au-delà d’un certain seuil, ces hormones peuvent entrainer un risque vital, cardio-vasculaire et neurologique.
Pour neutraliser ce risque, le cerveau fait alors disjoncter le circuit émotionnel en produisant des substances type kétamine et morphine, entrainant une forme d’anesthésie émotionnelle et physique. Si ce mécanisme de défense permet d’éviter une surproduction d’hormones de stress, elle met la victime dans un état dissociatif. Il va aussi avoir pour effet que la victime ne va plus ressentir la douleur et les émotions. Il peut aussi entrainer un sentiment d’irréalité.
Après la guerre du Vietnam, différentes études se sont intéressées à l’état de stress post-traumatique. L’une d’entre elles a pu montrer sur une IRM l’effet de sidération ainsi que l’effet de dissociation sur le cerveau.
En confrontant les vétérans à des images de guerre et en les faisant ainsi revivre l’expérience traumatisante, on voit sur l’IRM que :
- le cerveau ne fonctionne pas : c’est l’état de sidération ;
- l’hyper-activité de l’amygdale cérébrale d’une part, et le fait que le cerveau n’est pas connecté avec l’amygdale d’autre part ; c’est l’état de dissociation.
De conséquences à long terme :
- L’état de dissociation peut priver la victime de son ressenti à court, moyen ou long terme. Il peut entrainer de sentiments d’irréalité, de confusion, de dépersonnalisation, avec la sensation d’être spectateur de sa vie et d’être totalement inadapté dans sa relation aux autres. Ce sentiment d’inauthenticité peut être très douloureux.
- La dissociation peut également couper la victime de ses sensations corporelles, ce qui l’empêche de réagir comme il faudrait face au risque. Ainsi, elle peut se retrouver à supporter sans réaction des violences graves. Cette anesthésie est très dangereuse : ce n’est pas parce que la victime ne ressent pas le danger ou la violence, qu’elle ne l’expérience pas réellement.